COP-28 et G17 : sortir de la malédiction de la rente fossile

Chronique parue dans Les Echos du 31 octobre 2023

La COP28 va ouvrir ses portes d’ici quelques semaines à Dubaï dans les Emirats Arabes Unis. Les Emirats sont membres du G17. Vous ne connaissez pas le G17 ? Normal, il n’a pas  d’existence formelle. Constitué pour les besoins de mon dernier livre (chapitre IV), le G17 regroupe les économies les plus dépendantes de la production et de l’exportation d’énergie fossile. Certaines sont au Proche-Orient, mais pas toutes. On en trouve en Afrique, (Nigéria, Algérie, Afrique du Sud, Lybie), dans les pays développés (Australie, Norvège), sans oublier la Russie, le seul membre du G17 à exporter à la fois du pétrole, du gaz et du charbon.

Depuis le démarrage de la négociation climatique, les membres du G17 s’illustrent par leur capacité de freinage et d’obstruction. Le capital immobilisé pour la production et l’exportation d’énergie fossile y constitue l’ossature de l’économie. La transition bas carbone a donc un coût très élevé à court terme pour l’activité et la croissance car il faut se défaire de ces actifs carbonés. Les dirigeants en place préfèrent souvent reporter cette charge à plus tard, même lorsque leur pays est richement doté en ressources solaires ou en métaux critiques pour la transition énergétique dont la valorisation faciliterait la reconversion de leurs actifs carbonés.

Miroir déformant

Ces stratégies emprisonnent nombre de membres du G17 dans la malédiction de la rente fossile. Demain, le réveil risque d’être douloureux. Pour s’en convaincre, il suffit de voir l’état catastrophique des économies rentières affectées par l’effondrement de leur rente. Au Venezuela, le niveau de vie par habitant s’est contracté des trois-quarts et l’espérance de vie a reculé de 2,5 ans. La situation est sans doute pire en Lybie. L’espoir est que cette COP28 aux relents de pétrole provoque un électrochoc au sein du G17 pour sortir de ces stratégies attentistes suicidaires à moyen et long terme.

Mais le positionnement des rentiers du fossile est comme un miroir déformant. Le miroir reflète, de façon amplifiée, une question qui se pose à tous. La transition énergétique exige d’investir dans les actifs bas carbone et de désinvestir des actifs liés à la production et la consommation d’énergie fossile. Ce qui fera chuter les émissions, ce n’est pas l’investissement, mais le désinvestissement. Compte tenu de l’urgence climatique, ce désinvestissement doit être rapide. Or, il est à peine amorcé dans nos économies européennes qui continuent même d’octroyer des permis d’exploration en mer du Nord ou d’élargir leur capacité d’importation de gaz naturel.

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5 commentaires sur « COP-28 et G17 : sortir de la malédiction de la rente fossile »

  1. Bonjour,
    Je pense que vous prenez le problème des combustibles fossiles (Et non Énergies fossiles), à l’envers. Et vous n’êtes pas le seul.
    Ce n’est pas en fermant les puits ou les mines que nous allons diminuer la consommation, mais bien en changeant les modes de vie et la production de matériels manufacturés. C’est la baisse de la demande qui permettra la baisse de consommation des carburants fossiles.
    Les hydrocarbures fossiles ne sont pas utilisés exclusivement pour créer de l’énergie, mais également, par la pétrochimie qui doit représenter autours de 18% de la consommation de ces hydrocarbures.
    Le terme d’énergies fossiles pour parler du charbon, pétrole et gaz est impropre, la seule énergie fossile que je connaisse à ce jour est la radioactivité qui permet la vie sur cette planète (Peut-être qu’un jour, nous aurons l’énergie noire), et, accessoirement, de produire de l’énergie électrique à travers les centrales nucléaires. Si vous trempez votre main dans du pétrole, il ne vous arrivera rien, si vous garder un morceau d’uranium dans la poche, ce ne sera pas la même histoire…
    Cordialement
    Éric

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    1. Bonjour,
      Merci pour votre commentaire.
      Vous avez bien raison de rappeler l’importance de l’action sur la demande et, également, celle des débouchés non énergétiques des hydrocarbures (plastiques et engrais en particulier).
      Ces volets n’ont pas été développés dans la courte tribune des Échos, mais le sont dans « carbone fossile, carbone vivant ».
      Bien cordialement.

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  2. Il y a quand même un pays qui gère intelligemment sa rente fossile : La Norvège…Il faut dire qu’ils sont également gâtés par une hydroélectricité abondante qui leur permet de passer rapidement à l’électro-mobilité (La Norvège est le pays qui compte le plus fort pourcentage de véhicules électriques). Mais, à mon sens, la ressource fossile abondante n’est pas forcément une malédiction. C’est davantage le contexte social et moral du pays qui prévaut : Comparer par exemple la démocratie Norvégienne plutôt solide et efficace avec la théocratie Iranienne ou « l’autocrature » Russe…

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    1. Bonjour,
      Merci de votre commentaire. Vous avez totalement raison et la Norvège est engagée dans la phase d’investissement dans l’énergie décarboné (et finance la lutte contre la déforestation tropicale). Mais elle n’a pas entamé la phase de désinvestissement des énergies fossiles car elle continue d’accorder de nouveaux permis d’exploitation en mer du Nord.
      Cordialement,
      CdP

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