Le « paradis énergétique » virtuel de Donald Trump

Chronique parue le 22 avril 2025

En plein tumulte provoqué par le réarment douanier, un executive order mis en scène par le locataire de la Maison blanche entouré de mineurs en tenue de fond est passé sous les radars. Il vise à relancer la production d’électricité à partir du charbon par un ensemble de soutiens fiscaux et réglementaires.

Monde virtuel et réalités économiques et géologiques

C’est une nouvelle pierre à la stratégie trumpienne visant à créer un « paradis énergétique » grâce à la relance tous azimuts des sources fossiles. Autant que celle du réarmement douanier, cette stratégie se heurte à de dures réalités économiques et mêmes géologiques. Si les Etats-Unis disposent d’immenses réserves exploitables de charbon, ce n’est pas le cas du pétrole ou du gaz qui ne couvrent, aux derniers pointages, que moins de 15 années de production (plus de 500 pour le charbon). Une réalité non virtuelle à prendre en considération.

Commençons par le pétrole dont le pays est devenu exportateur net sous le mandat de Joe Biden. On peut techniquement accélérer son extraction, mais cela coûte cher en investissement. D’après la réserve fédérale de Kansas City, il faut que le baril atteigne 89$ pour les rentabiliser. Avec un baril descendu dans la zone des 60$, on n’est pas près de voir un regain des forages aux Etats-Unis, sauf à mettre des droits de douane de l’ordre de 35%… Mais alors on ne pourra plus exporter !

Le gaz, instrument de négociation avec l’Europe

L’affaire est un peu différente pour le gaz dont le prix est plus bas aux Etats-Unis qu’en Europe et en Asie. Il est possible, le temps d’un mandat, d’accroître son exportation. Donald Trump s’y est préparé en mettant fin, le jour de son inauguration, au moratoire sur les capacités d’exportation de GNL décidé par Joe Biden. Dans son bras de fer avec l’Europe, il compte sur le GNL pour réduire un déficit estimé par lui à 300 Mds de dollars. Pour compenser le dixième de ce déficit avec du GNL, il faudrait que le prix du gaz s’envole. Mais alors quid de la promesse du paradis énergétique dans lequel l’abondance de l’énergie fossile doit massivement alléger la facture des consommateurs ?

Et la relance charbonnière ? Trump l’avait déjà promise durant son premier mandat, sans grand succès. Cette fois-ci, le prétexte est l’envolée des besoins en électricité pour l’intelligence artificielle. Il est vrai que la concentration maximale de data centers se trouve en Virginie à proximité de mines en déclin. Pour enrayer ce déclin, il faudrait que le minerai retrouve sa compétitivité face au gaz et encore plus face au soleil et au vent.

L’administration républicaine tente d’y contribuer en démantelant les soutiens aux renouvelables transitant par l’Inflation Reduction Act. Cela entraine quelques frottements car ses principaux bénéficiaires sont des Etats républicains comme le Texas, leader national sur l’éolien. Dans son décret promouvant le charbon, Trump a du coup ouvert un nouveau front en chargeant sa ministre de la justice de prendre toutes les mesures appropriées pour bloquer l’application des lois pro-climat des Etats démocrates. Au nom du paradis énergétique virtuel : deux poids, deux mesures !

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Un avis sur « Le « paradis énergétique » virtuel de Donald Trump »

  1. Cher Christian,

    Ta chronique est excellente mais combien de temps peut durer cette folie ?
    Dans un style différent, je t’adresse une autre chronique publiée ce matin dans Le Monde : https://www.lemonde.fr/article-offert/a0dc8b0caa22-6598770/offensive-de-trump-contre-les-sciences-le-prejudice-pour-la-recherche-americaine-et-mondiale-sera-considerable

    J’avance sur ton livre mais un peu lentement en raison d’autres contraintes.

    Amitiés,
    Hugues

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